Ascension au refuge de la Dent d'Oche (2114 m)

Date du circuit : Août 2022

Randonnée à la journée

Activités : Randonnée

Chaînes et massifs montagneux : Chablais

Ecosystème : Montagne

Nombre de jours : 1 jour

Altitude maxi : 2114 m

Dénivelé + : 908 m

Dénivelé - : 908 m

En montagne, il est des noms de sommets qui vous interpellent dès leur première prononciation sans même connaître leur localisation précise. La Dent d'Oche, surplombant le lac Léman, est de ces hautes destinations qui aspirent à la fois la crainte et l'admiration. C'est une montagne de Haute-Savoie, dans le massif du Chablais, à proximité de la frontière franco-suisse. Sommet culminant à 2221 mètres d'altitude, son ascension reste dangereuse, même pour les initiés. Des accidents mortels ont lieu chaque année sur cette portion qui sépare le refuge éponyme (2114 m) et son point culminant.

Sommaire : Montée au refuge de la Dent d'Oche

Récit
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Récit

Une connaissance m'a invitée à séjourner quelques jours dans son chalet de vacances, à Thollon-les-Mémises, au mois d'août 2022. Ensemble, nous avons décidé de grimper en une journée jusqu'au refuge de la Dent d'Oche, sans forcément vouloir atteindre sa face la plus élevée et sans savoir réellement ce qui nous attend. Le départ pour la première étape de l'ascension se fait depuis le parking de la Fétuière à Bernex (1206 m), station de sports d'hiver et d'été du pays d'Evian vallée d'Abondance. Malgré la relative fraîcheur grâce à l'ombre projetée par la forêt communale, la chaleur se faisait grandement ressentir. Dès 8h30, nous voilà en route. Un sentier forestier s'élève à travers bois, devenant moins pentu sous couvert des arbres. À la sortie de la forêt, le chemin bifurque avec un deuxième qui se poursuit par une montée plus raide, par la rive gauche du vallon de l'Ugine. Un panneau indique l'entrée dans un espace pastoral protégé. D'autres randonneurs suivent le même itinéraire en lacets, qui grimpe aisément jusqu'à un alpage. Déjà, quand les sapins s'écartent peu à peu au milieu des pâturages, les premières crêtes de montagne se révèlent comme une récompense dans un ciel azur.

Passant de l'ombre à la lumière, en moins d'une heure de marche, on arrive à l'alpage des Chalets d'Oche, une ferme en exploitation en saison estivale. À 1630 mètres d'altitude, les alpages du vallon d'Oche sont dominé par la Dent d'Oche au Nord et le Château d'Oche à l'Est. À la ferme, on y trouve des fromages fermiers et quelques rafraîchissements, à savourer sur une grande terrasse ombragée. Une fontaine à proximité est l'occasion de se désaltérer et de remplir sa gourde avant la poursuite de l'ascension.

Exposé plein Sud, un sentier débute immédiatement après les Chalets d'Oche avec un panneau directionnel mentionnant le col de Rebollion (en une heure) et la Dent d'Oche (en deux heures). Ce sont des données assez relatives, évidemment ! Cet itinéraire en lacets est bien balisé car il emprunte une partie du GR Balcon du Léman (balisage blanc-rouge). Au début, il grimpe en douceur vers le Nord-Est et, après un virage sec, la montée continue assez fortement vers le Nord-Ouest. Des terrasses naturelles au bord du talus permettent d'avoir une vue imprenable sur le vallon d'Oche, sur des aiguilles, des cols et des crêtes verdoyantes. Mon amie est déjà loin devant moi, je reste à la traîne à cause d'un manque de souffle. Après d'intenses efforts, me voilà au col de Rebollion (1915 m) qui offre un paysage panoramique sur les montagnes du Chablais qui dominent Bernex. Il est possible aussi de distinguer un bout du lac Léman dans un lointain brumeux.

Attention !

Au col, une pancarte rouge avertit le randonneur :

Direction "Refuge de la Dent d'Oche et Dent d'Oche"
Itinéraire non balisé, passage vertigineux et extrêment délicat

Le col de Rebollion est au croisement de deux parcours : à gauche, le GR se prolonge jusqu'au col de Neuvaz ; à droite, c'est la direction pour la Dent d'Oche via le refuge éponyme. Après avoir contemplé une dernière fois le panorama montagneux, je reprends mon pèlerinage sur la piste de droite qui mène très vite à un univers minéral. Le sentier devient escarpé et rocailleux. Certains couloirs rocheux sont étroits et raides. Les bâtons de marche doivent être rangés impérativement dans le sac à dos. La montée vertigineuse, très technique, est heureusement sécurisée par des chaînes tout au long de l'ascension, considérée comme une véritable escalade aérienne à mains nues entre les falaises. La solidarité et l'entraide avec les autres grimpistes en amont sont essentiels pour réussir la progression, lente mais prudente. J'ai même croisé un homme de 81 ans qui en "chiait" en descendant et, aussi, un chamois peu farouche allongé près du passage pierreux. De superbes rencontres !

Je déjeune sur une maigre surface plate qui surplombe le vallon d'Oche, baigné par le soleil. Dans les derniers 100 mètres sous le refuge de la Dent d'Oche, le sentier se redresse, puis se resserre et devient une cheminée équipée avec des câbles. Une succession de marches naturelles permet de chevaucher une barre rocheuse, il est nécessaire même d'y poser les mains pour grimper en faisant attention aux points d'appui. Plus haut, je croise mon amie qui descendait ! Elle a eu le temps de savourer une bière au refuge et m'attendait en vain. Je suis monté lentement et avec prudence. Enfin, j'arrive au refuge de la Dent d'Oche, perché à 2114 mètres d'altitude sur une arête, qui propose une quarantaine de couchages et une petite restauration. C'est aussi le lieu idéal pour assister au coucher de soleil. Je m'installe sur la terrasse pour me reposer et me désaltérer avec une bière méritée. Inutile de poursuivre l'aventure les pentes Sud jusqu'à la cheminée de la Dent d'Oche, +100 mètres en amont le long d'une crête vertigineuse et périlleuse ; le chemin parcouru représente déjà beaucoup pour moi. Je me rappelle ce que l'office de tourisme du Bernex m'a raconté la veille : une semaine plus tôt, une jeune femme a dévissé au sommet de la Dent d'Oche après avoir voulu faire un selfie sur l'arête rocheuse. Elle est morte sur le coup après une terrible chute.

Depuis la terrasse du refuge et d'un promontoire rocheux, le panorama à 360° sur les cimes du massif du Chablais, le lac Léman et les Alpes suisses est une récompense en soi. 900 mètres de dénivelé aller-retour depuis le parking de la Fétuière, je peux en être fier. Je réalise de nombreuses photos sur cet ensemble alpin, avec en toile de fond la silhouette d'une chaîne montagneuse et en contrebas les Chalets d'Oche à gauche, les villages côtiers du littoral du Léman à droite. La ligne d'horizon est spectaculaire et renversante, parfaitement nette.

Le retour à la vallée, bien que connaissant le chemin en sens inverse sur le même versant ensoleillé et malgré les nombreuses accroches, reste encore aventureux. Le danger est présent derrière chaque rocher ou virage. À peine avoir franchi à nouveau le col de Rebollion, sans avoir fait de pause, me voilà en train de glisser en arrière dans le sentier descendant du Balcon du Léman. Mon coude se cogne violemment à une pierre sur le bas-côté. Un filet de sang inonde mon avant-bras. Avec la paume de mon autre main, je me fais une compresse. Un couple de randonneurs me dépasse, je leur demande de prévenir le chalet d'alpage 200 mètres plus bas pour préparer des soins. Après 5 minutes de compression, je reprends mon tracé en me soutenant avec mes bâtons de marche et rejoins le vallon d'Oche moins d'une heure après. Ainsi, je retrouve mon amie qui m'attendait fébrilement sur la piste d'alpage, près des Chalets d'Oche, au son des cloches des vaches laitières de race Abondance qui retentissaient en cette fin de journée.

En voyant ma plaie, une des employées me fait une première compresse, puis je vais à la fontaine pour nettoyer le contour de ma blessure. Plus de peur que de mal. Le propriétaire de la ferme me propose une bière blanche et plus tard un verre de lait de vache après la traite. Ensemble avec mon amie, on quitte l'alpage pour gagner le parking 400 mètres plus bas, terminant notre folle journée au restaurant La Fétuière pour déguster une bière du Léman. Mon amie me fait une nouvelle compresse et un bandage autour du coude, qui continuait de saigner. Il est 20 heures passées, le soleil couchant montre la pointe de son museau coloré. Nous rentrons au chalet de vacances, à Thollon-les-Mémises, pour dîner avec sa famille. Surtout pour nous reposer enfin !