Trekking Refuge Les Barmettes - Refuge du Grand Bec (Hauts de la Vanoise)

Date de l'étape : 10 août 2018

Altitude maxi : 2560 m

Dénivelé + : 550 m

Dénivelé - : 160 m

Durée : 7h00

La nuit passée aux Barmettes avait été peu reposante. Des courbatures faisaient déjà leur apparition, très localisées pour l'instant, même si une légère fatigue gagnait du terrain. Par manque de volonté pour reprendre la route d'emblée, je m'attardais dans la salle de petit-déjeuner. Devant mon café brûlant et mes tartines beurrées, j'étirais mes membres avec mollesse. Les vitres restaient embrumées par le brouillard. Par moments, aucune visibilité n'était possible sur la vallée de Pralognan. Après une dernière consultation de ma carte de randonnée, je sortis du refuge par la porte arrière réservée aux randonneurs.

À l'extérieur, la moiteur de la brume me frappait au visage. Une désolation spectrale avait pris possession des montagnes, qui disparaissaient et réapparaissaient selon le bon plaisir d'une brise légèrement humide. Ayant déjà arpenté ces lieux les années passées, je peinais à reconnaître le paysage sous la rosée du matin. En ce jour voilé, la visibilité risquerait d'être chancelante, imprévisible.

Au-dessus du refuge des Barmettes, une butte mène au télésiège du Génépy (2015 m), dont les Barmettes sont le terminus et Pralognan le départ. Une piste clairement identifiable malgré le brouillard prenait la direction du Mont Bochor, environ 200 mètres en amont. Cet itinéraire d'une durée approximative d'une heure, en lacets serrés, donne l'avantage de surplomber les prairies du vallon de la Glière et de côtoyer une flore exceptionnelle. L'arrivée et le retrait successifs de masses flottantes masquaient en grande partie ce paysage bucolique. Une formidable mer de nuages affluait et s'en allait telle une marée en engloutissant les alpages, les forêts, les versants, les sommets et partiellement les cirques. Durant un long moment, tout se confondait, impossible de reconnaître le parcours effectué la veille depuis le col du Grand Marchet jusqu'en bas du cirque du Dard.

J'arrivai sur les pistes de ski dite « Les Glières », à remonter jusqu'à atteindre le Mont Bochor d'en Haut (2200 m). Une enveloppe nuageuse m'accueillait encore. La tarentaise ou Tarine, vache emblématique de la Savoie, aux yeux ourlés de longs cils, s'épanouissait sur le plateau verdoyant du Bochor et me fixait du regard, interloquée par ma présence. J'en rencontrais d'autres qui broutaient, plus haut, à contourner prudemment car elles restaient impassibles en travers du chemin balisé.

À hauteur du télésiège de l'Ancolie (2330 m), s'ouvrait le cirque du Creux Noir. Un vallon à l'ambiance minérale prenait la direction du Col Noir (2512 m) et du Col Rosset (2570 m). Mais là n'était pas ma route ! Une sente s'élevait en lacets à gauche pour mieux dominer le cirque. Ici débute le sentier n°9 dit « les Échines », considéré comme étant une Randonnée Noire par l'Office de Tourisme de Pralognan-la-Vanoise. La montée peut être pénible, surtout lorsque le brouillard s'invite à la course. Peu à peu, je tournai le dos aux glaciers de la Vanoise et du Col Noir, d'où émergeait la Grande Casse qui s'évanouissait dans les nuages. Sous l'Aiguille du Bochor, un couloir rocheux câblé et équipé d'une chaîne facilite l'escalade jusqu'à un collet. La dégringolade pluvieuse de la veille avait encore imprégné quelques endroits d'une fine couche dérapant. Le sentier des Échines devient de plus en plus aérien en gagnant l'arête sud-ouest de l'Aiguille du Bochor. De là, il se stabilise légèrement en ligne droite et devient un parcours panoramique. En travers de la brume qui montait sans cesse et avalait les versants herbeux, se distinguait en contrebas le Mont Bochor et, au-delà, se laissait entrevoir des pans de la vallée de Chavière. Désormais, le chemin étroit dominait un ravin au centre d'un paysage perpétré dans une épaisse fumée argentée. À éviter d'y mettre un pied si l'on est sujette aux vertiges ! Une arête rocheuse permet de dominer le Ravin de Leschaux, sillonné par un long sentier. Au départ du hameau des Granges à Pralognan-la-Vanoise, une piste forestière s'élevait en bordure de forêt, puis en épingle dans le ravin pour parvenir au Col de Leschaux.

Le col était le passage obligé pour atteindre mon refuge du jour. Avant de m'engager par là, j'ai du patienter que le tronçon au col ne soit plus dissimulé dans un flux et reflux de méandre vaporeuse. Une semaine plus tôt, de violents orages avaient éclaté en Vanoise, occasionnant des coulées de boue et des chutes de pierres. Le chemin traversant le Ravin de Leschaux a alors été victime d'éboulements, le rendant instable. 17 randonneurs se sont retrouvés pris au piège, du coup cette section jusqu'en aval a été fermée au public sur toute sa longueur. Arrivé au Col de Leschaux (2564 m), sous la Pointe de Leschaux, je demeurai quelques minutes sur ce sentier balcon offrant un large panorama sur les massifs de la Vanoise autour de la vallée de Pralognan. Des auréoles nuageuses s'accrochaient encore sur les hauts sommets. Marquant l'entrée du Parc de la Vanoise, un panneau fendu jonchait en partie dans la poussière et dans les pentes herbeuses, témoin de l'orage. Un regard jeté en arrière, vers mon point d'origine, me fit découvrir mon itinéraire vertigineux et exceptionnel depuis le cirque du Creux Noir. À l'extrémité, à hauteur d'homme, se hissaient majestueusement les glaciers du Grand Marchet et du Dard, s'éclaircissant enfin sous le joug d'un soleil triomphant.

Sur l'autre versant du Col de Leschaux, se déployait un paysage minéral, exposant la face Sud du Grand Bec. Une pente descendante dans un éboulis de schistes, en haut d'une cuvette, longeait de part et d'autre des falaises de calcaire. Arrivé en contrebas, sur un plateau panoramique, la vue se développait en un large tableau façonné de moraines, névés, pierriers et ruisseaux. Le tout sous la houlette de la Pointe du Vallonnet à l'Est. Une fenêtre se prolongeait même jusqu'à Courchevel à l'Ouest, pendant que mon refuge se rendait visible au loin, en direction du Nord. Pour le gagner, il fallait contourner le cirque du Grand Bec dominant une combe. Nulle difficulté à redouter durant la traversée ; seulement des cascades à franchir, blocs caillouteux à surmonter, talus fleuris à découvrir. Rencontre insolite avec des vaches laitières Abondance, occupées à paître à hauteur du ruisseau de la Vuzelle. En perspective du Grand Bec (3398 m), véritable muraille rocheuse, des bouquetins ont croisé mon passage, déguerpisant vite à mon approche. Sur un plateau élevé, au fond du cirque du Grand Bec et en marge du glacier de la Vuzelle, des gabions signalaient l'emplacement d'un ancien refuge. D'ici, je profitai d'un meilleur point de vue sur la Pointe de la Vuzelle, au pied duquel se détachait le refuge du Grand Bec perché à 2405 mètres d'altitude.

Situé au col de la Vuzelle sur un promontoire ensoleillé, le petit refuge de montagne a une capacité d'accueil maximale de 36 lits, répartis entre 4 dortoirs, avec vue imprenable sur le sommet du Grand Bec, la pointe du Vallonnet et la vallée de Chavière. Agnès la gardienne est passionnée par son métier, en charge de ce petit nid perché depuis 2-3 ans et son accueil chaleureux relevé d'une dose de rudesse l'atteste. Je signai à un registre tenu par sa mère, qui m'indiqua la voie à suivre pour monter à mon dortoir. Après m'être délesté de mon sac-à-dos, à 2 heures du dîner, je sortis par une terrasse avec accès direct sur l'extérieur, le long d'une pente herbeuse du col de la Vuzelle. Ce coin offre une zone de détente à ciel ouvert, avec ses fauteuils et un bachal en bois sculpté, terme savoyard désignant une fontaine. Un couple belge et une famille avec trois enfants profitaient de l'air pur et frais, parfois en jouant avec le seul chien de la maisonnée.

Ce qui est fort appréciable en haute montagne, ce sont les tablées bien garnies des refuges de la Vanoise. Celle du Grand Bec respecte fidèlement cette tradition savoyarde, privilégiant d'abord les produits régionaux et les producteurs locaux de Pralognan pour une cuisine savoureuse. Au fil du temps, Agnès est passé maître dans la préparation soignée de nombreux plats pour le repas du soir. Elle s'est invitée à notre table, emmenant une franche cordialité à notre petit groupe. Après un dîner bien copieux, nous avons eu le droit à la rituelle liqueur des Alpes : le Génépi ! Puis nous sommes tous sorti dehors à l'annonce d'une tribu de bouquetins face au glacier de la Vuzelle, descendant des pentes herbeuses au soleil couchant. Un vent glacial soufflait au-dessus du refuge du Grand Bec, nous faisant profiter d'une vue dégagée et contemplative sur les montagnes environnantes. Une pareille conclusion était propice pour passer une agréable nuit étoilée, loin des lumières de la ville, au firmament d'un environnement magique où règnent sérénité et solitude.

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09-09-2018

04-09-2018

22-09-2018

#DuoSolidaire, après-midi

À cause d'une brume qui avalait les passages aériens et d'une chaleur étouffante, l'ours Boute-en-train a souvent traîné la patte sur le sentier en balcon « les Échines » entre le cirque du Creux Noir et le col de Leschaux (2564 m). Sa fidèle amie la tortue ne cessait de l'encourager et lui venir en aide pour éviter les faux pas.

#DuoSolidaire, soirée

Au refuge du Grand Bec (2405 m) après une ascension difficile entre le Bochor et col de Leschaux, le #DuoSolidaire s'est remis de ses émotions autour d'un verre de Génépi ! Agnès la gardienne sait comment satisfaire ses hôtes, même les plus insolites.

Refuge Les Barmettes - Col de Leschaux - Refuge du Grand Bec (2398 m)

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